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31 août 2009 1 31 /08 /août /2009 05:15

La campagne québécoise est bien comme on se l’imagine. Lorsque ce ne sont pas d’infinies étendues cultivées, hérissées de fermes en bois rouge, ce sont d’immenses forêts, vertes encore, mais bientôt colorées de rouge et de jaune. Les routes au bitume noir sombre et au bandes jaunes sont soit absolument droites en plaine, soit au contraire tortueuses et cahoteuses en forêt. Elles suivent alors la courbe des collines et le contour des lacs et se ramifient sans cesse en petits chemins chargés de promesses qui s’enfoncent dans l’ombre des arbres. Les bons gros trucks ont définitivement remplacés les rutilantes mustangs du centre de Montréal, les flics de l’autoroute sont loin derrière nous, nous pouvons rouler paisiblement, à vive allure, sur cette route de rêve…

 

Dans la voiture, nous sommes cinq. Luc, l’un des comédiens, son fils de seize ans, Camille une autre comédienne, Aurélie et moi. Je serre contre moi le pack de bière que j’ai tenu à emmener pour montrer ma bonne volonté à la troupe. Pour l’instant, je ne sais pas encore bien en quoi ce week-end va consister. Nous arrivons à Cherlsey ou Chertsay peut-être, je n’ai jamais réussi à comprendre correctement le nom du patelin. C’est là que la petite compagnie de théâtre joue depuis le milieu de l’été, dans la chapelle-salle des fêtes du village. L’endroit est quasiment désert. Une seule véritable rue, un seul bar-grill, l’immense majorité des habitant est disséminée dans les bois alentours, à des kilomètres parfois de cette fichue chapelle.

 

Je rencontre enfin le reste de la troupe. Il y a Abdel qui vient du Maroc et connais bien la France pour y avoir joué cinq ans à Toulouse, André, le metteur en scène et Philippe, son « ami » (des tapettes quoi…) le dernier acteur. Il y a aussi Maurice qui écrit des contes pour enfants et qui tient aussi le bar de la chapelle (mon dieu que j’aime ce pays) et Serge dont la femme a monté le projet mais étant en train de cuire sous le soleil mexicain, elle a chargé son mari de gérer les entrées et ce genre de trucs. J’apprends que ce soir, en fait de camping, nous dormons tous dans le chalet du metteur en scène, dans la montagne, au bord du lac.

 

Pendant que les acteurs se préparent, les spectateurs arrivent. Ce soir nous serons seize à regarder le spectacle, mais ils ont déjà joué pour cinq personnes… Comme il serait sûrement mal venu que j’ouvre ma propre bière dans la chapelle, je fume beaucoup et je fini par me convaincre qu’il s’agit bien d’un bar, là, au fond de la chapelle… je commande donc une bière au comptoir divin. La pièce commence, c’est plutôt le genre  théâtre de boulevard, une comédie que l’on dit légère, mais les acteurs sont assez bons… le public l’est moins. Ce sont de vieux canadiens français sortis de leur cambrousse et leur vie ne pas doit les avoir souvent amené devant un rideau rouge… ils parlent aux comédiens, discutent pendant la pièce, n’hésitent pas à sortir en plein milieu pour fumer avant de revenir bruyamment. Bref, la pièce finie, nous partons tous en voiture vers le chalet.

 

Il fait nuit quand nous arrivons, je ne vois donc pas le lac, ni rien du tout d’autre. Je me console en me disant que bientôt, je pourrais ouvrir mon pack de bière et le partager. Oui, mais voilà, c’était sans compter avec le caractère fantasque et imprévisible des acteurs, d’une actrice en fait. Debout dans la cuisine, tout le monde s’active pour faire la tambouille quand Camille vient se planter au milieu de la pièce et déclare qu’elle trouve inadmissible qu’Aurélie ai amené un étranger (il s’agit de moi ! non mais… moi, un étranger !) sans demander l’avis de toute la troupe. (en fait Aurélie avait prévenu André, donc le propriétaire du chalet mais celui-ci avait oublié de prévenir les autres). Donc crise, éclats de voix, tension qui monte et moi qui vois ma bière salvatrice s’éloigner inexorablement. La dispute retombe, je pars fumer une clope avec aurélie pour essayer de comprendre, mais j’y comprends rien. Bon… à ce moment là je sais pas trop où me mettre vu que je dois quand même rester le week-end avec eux dans ce petit chalet. Mais paradoxalement, tous les autres vont devenir beaucoup plus bienveillants et chaleureux avec moi pour détendre le truc. L’incident trouve sa fin sur ces magnifiques paroles de Philipe « allez, je t’aime bien théo, prend donc une bière ». J’ai enfin ma bière.

 

Le second événement marquant de la soirée intervient peu après, quand trois jeunes ratons-laveurs décident de venir parader sur le porche de la maison. Apparemment, c’est plutôt rare parce que tout le monde est devenu frénétique, voulant prendre des photos, les nourrir de cacahuètes jusque dans la main, tandis que moi, j’observais placidement ces espèces de petits blaireaux à l’air de bandit. On se couche et je dors sous la partie couverte du porche, protégé du froid (car il fait froid) par une géniale porte-moustiquaire que même un raton pourrait ouvrir d’un coup de patte. Le lendemain matin, on se réveille vers midi pour un brunch canadien : œufs brouillés, lard frit, pâté de graisse de porc, beurre de cacahuète et… café. Il pleut mais la vue sur le lac, de l’autre côté de la route, reste magnifique. On fait un feu pour se réchauffer.

 

 Ce soir étant véritablement « la dernière », il y aura en plus un concert de chants harmoniques. Quatre chanteuses et une pianiste nous rejoignent donc, elles dormiront aussi au chalet cette nuit. Une parenthèse sur la pianiste. Je pense pouvoir dire que nous avons là La femme parfaite pour Tomtom. Blonde, très jolie et extrêmement gentille, plutôt silencieuse ce qui lui permettra d’endurer tout les discours politiques de l’autre Normand, elle joue du piano depuis toujours, beaucoup de Jazz. Ai-je précisé qu’elle était jolie ?

 

Le temps de manger au seul restau du coin (l’occasion pour moi de goûter à la fameuse Poutine, plat traditionnel d’ici, en fait l’héritier direct du Welch de la mère patrie, en remplaçant le pain par des frites.) et on repart à la chapelle. Trente personnes ce soir. Sympa. Et puis il faut démonter le décor, la scène et l’estrade. Mais l’ambiance est cool, car Serge (qui s’occupait aussi de la sono) passe très fort de bons Blues qui résonnent dans la chapelle. Un mot sur Serge, homme exceptionnel s’il en est. Je le découvre un peu mieux alors qu’il me ramène en voiture au chalet pour la fête finale. Ancien délinquant, aujourd’hui devenu éducateur social pour les jeunes sans-abris, autrefois pédé, aujourd’hui marié, il doit avoir dans les cinquante balais et adore le Blues (à peine trois minutes entre le moment où il arrête le Cd de la chapelle et celui où il allume son lecteur cassette dans la voiture). Plus tard dans la soirée, il sortira une guitare de son coffre pour jouer des blues canadiens de vieux hippies, sa cigarette coincée entre les cordes. Serge mourra d’un cancer. Alors que nous discutions dehors le premier soir, il s’arrête brusquement et rigole : il venait de s’allumer une nouvelle cigarette en tenant toujours sa première à peine entamée dans la main. L’habitude.

 

Bière et vin, coucher quatre heure. Repart le lendemain matin, n’ayant pas pu se baigner dans le lac à cause du temps. Nous sommes le 29 août et je n’ai pas quitté une seconde mon pull et ma veste en cuir. Même à l’intérieur.

 

Aurélie est un peu dépitée de cette fin d’un projet de plusieurs mois, alors pour se consoler elle fait un gâteau au chocolat. C’est bon, les gâteaux au chocolat.

 

théo

 

 

Je vous aime tous très fort et merci pour vos commentaires précédents !

 

 

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commentaires

N
Le truc avec les drapeaux c'est marrant aussi, je sais pas trop du coup.<br /> Pas de nouvelles de Laurent, c'est con !<br /> Je vais lui envoyer un mail...<br /> Pis t'a qu'a apprendre à dessiner; zut.<br /> <br /> Bisous aussi.
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P
<br /> non, non, mais j'aime bien aussi les drapeaux! les avais pas vu quand j'ai écrit tout-à-l'heure...<br /> <br /> embrasse laurent pour moi!<br /> <br /> <br />
D
Nous aussi on t'aime Théo.. J'espère que tu pourras quand même profiter de l'été Indien avant les rigueurs de l'hiver ! Je sens que tu vas prendre ton pied cette année mon p'tit père... Veinard !
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N
ETRANGER !<br /> ETRANGEEEEEER !<br /> <br /> Les vrais étrangers qui partent à l'étranger ils prennent des photos, au lieu de raconter vaguement que putain la vue du lac depuis le chalet dans la montagne est belle même quand il pleut !<br /> Sinon passe le bonjour aux ratons laveurs, et tu pourrais nous dire si l'accent québecois est dur à comprendre, dur à pas en rire, tout ça ? C'est vrai que du coup tous les gens ils sont ridicules là bas ?<br /> T'es le seul à poster... pour la peine je vais essayer de tapisser le blog de feuilles d'érables. Nous avons une dame en Californie, et certaines personnes n'ont aucune nouvelle d'elle. <br /> Au fait les autres là, si vous avez des réclamations sur le design du blog, ben au lieu de les faire, changez le design à votre guise ça sera plus marrant ! Enfin moi je trouverais ça marrant en tout cas. Je dis ça comme ça. Histoire de faire un truc vraiment collectif!
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P
<br /> éhi nico!<br /> <br /> en fait j'ai pas d'appareil photo ici, alors... mais j'aime bien le design que t'as fait avec la route!<br /> <br /> toujours sympa la lorraine, tu peux poster depuis là-bas je pense, vu que c'est déjà plus tout-à-fait la France...<br /> <br /> des nouvelles de Laurent? il m'avait dit qu'il essaierait de te voir sur Paris... faudrait lui donner l'adresse du blog.<br /> <br /> bisous<br /> <br /> <br />