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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 23:22

Exemple de B.O. : https://www.youtube.com/watch?v=cGUv55GyKvI

 

Le dernier soir, il faut retrouver un taxi. Celui-ci est particulièrement peu aimable, mais il invite quand même son passager à participer au micro de sa compagnie « 2ello bil inglizi : kiss ukhtak akhouz charmouta, 3arifo sawté, anta 2ello bil inglizi, kiss ukhtak akhouz charmouta ». Il avait l'air vraiment mécontent.

 

Burj Hammoud, quartier arménien, toujours le paradis de la "Birkinstock" made in Lebanon.

 

« Mais alors pourquoi tu viens ? » La question a pu être posée avant le décollage, ou pendant ou après je ne me souviens plus. Mais qui n'est pas trop heureux de converser, ceinture attachée et air détaché, avec sa voisine, plutôt que de suer à grosses gouttes lorsque l'avion s'incline pour quitter le sol, durant ses secondes où l'on ne pense qu'au dernier vol du Concorde au XXème siècle ? « Au oui je suppose que pour s'amuser c'est bien... ». Ce n'est pas ce que j'ai dit, mais j'ai compris que la discussion allait tourner court, même si impossible n'est pas Français.

« Tu veux partir au Canada ? Pour étudier ? Pour travailler ? » Quand une dentiste associée trouve son travail routinier à Beyrouth, face au choix entre 3 villes canadiennes, l'Europe pour 10 ans, les mises à niveau pour exercer à nouveau, ce ne sont pas les fours à arc électrique de 100 mégawatts qui vont l'impressionner. Les cocktails Bloody Mary et les séries américaines auront traité ces sujets mieux que votre serviteur, qui dans un élan littéraire égocentrique (je rappelle que sur un blog, vous ne pouvez pas m'arrêter pour signaler les pléonasmes), s'interroge encore sur la question initiale et la pauvre réponse qu'il a dû fournir.

 

La réserve de cèdres de Tannourine, fermée au public et où je m'enfonçais jusqu'aux genoux dans la neige.

 

Que viens-je chercher au juste ? Certainement pas la pluie battante qui m'accompagne de Jbeil à Saïda, sans croire à la neige de Tannourine. Belle leçon après avoir annoncé autour de moi que j'allais prendre le soleil. Une journée entière les pieds trempés, à peiner dans le trafic démentiel, avec les bus et les taxis, à essuyer mes vêtements et la tentative de conversion à l'islam d'un marchand de miel : voilà ce que le sort réserve à ceux qui rêvent de Club Med. Bien fait.

Il faut fuir la grande ville, puis les grands axes. Il faut oublier la boîte automatique, mais pas la sortie du rond-point, sinon c'est direction Chiyah ou Chatila, un autre dépaysement. Ne pas laisser au vide-poches l'instinct d'orientation, l'esprit de déduction et le klaxon. Le naturel revient toujours au galop : je ne suis pas arrivé à Zouk Mikaël à 15km au nord de Beyrouth que déjà je double par la droite.

 

Au « mémorial de la Résistance » du Hezbollah sont exposées notamment des bombes à fragmentations qui auraient été prises à l'armée israélienne.

 

De retour à Beyrouth, je retrouve mon intermédiaire immobilier arménien, l'homme qui début 2010 nous a mis sur la voie de mon appartement du second semestre, devenu depuis une auberge de jeunesse (sans doute notre propension à ajouter des matelas au sol a-t-elle inspiré les voisins du rez-de-chaussée). En tant qu'artisan, il subit la concurrence des réfugiés syriens. En tant qu'agent immobilier, il constate la diminution des séjours d'Européens et de gens du Golfe. Au sujet de la météo, il m'explique un proverbe arménien « il y a toujours 2 hivers, un pour les catholiques, un pour les orthodoxes » : je comprends mieux son contexte économique. Et aussi qu'il ne faut jamais brûler tout son bois avant mars, mais les parallèles s'arrêtent, ma géométrie devient non euclidienne sous les effets du narguilé. Je repars choqué qu'il ait connu Cannes dans les années 1970 (« they put new flowers in gardens at 5 in the morning to have each day the city beautiful ») en tant que danseur folklorique pour un spectacle de Fayrouz. Il demeure heureux que je sois venu m'enquérir de sa santé, lui qui avait à l'époque eu une conjonctivite à cause des poussières de ponçage.

 

J'ai également trouvé un usage au cendrier.

 

Il est temps de retrouver la ville qui fête, déguste, boit et danse, même si en pleine semaine les salariés des organisations internationales n'ont pas toute leur énergie. S'il est un secteur d'activité qui ne connaît pas la crise, c'est peut-être celui-là. C'est une joie de les revoir, et une plus grande encore de les savoir épanouis dans un contexte difficile. Ces administrations ont ici le mérite d'exister. 

Tranquillement, le séjour avance avec une vue imprenable sur la folie du monde. Toujours davantage de gens, venant de Syrie, d'Egypte, d'Inde, d'Ethiopie, des Philippines, ou d'où sais-je encore, conséquences des inégalités et conflits internationaux. Toujours cette présence intense du monde, comme cristallisée ici, dans la nonchalante quiétude requise pour supporter le "rythme" de Beyrouth. Ce séjour pourrait s'apparenter à ces vacances que s'offrent des binationaux et/ou expatriés aisés, distants de leurs proches de quelques heures d'avion seulement. Mais je ne suis pas revenu depuis plus de 5 ans, aucune famille ne m'attendait à l'aéroport pour m'emmener au village. C'est au contraire un premier exercice de patience et de négociation, les chauffeurs n'étant guère impressionnés par ce rouquin certes passablement arabophone mais à l'air hagard. Je reviens découvrir ce que je crois connaître parce que je l'ai déjà vu, sans m'en rappeler grand'chose. Dans un quartier connu, j'habite l'appartement d'un parfait inconnu où les choses me sont familières. Les meubles, les objets, le chauffe-eau que j'ai oublié d'allumer, les lampes laissées volontairement allumées : tout est fonctionnel malgré le décalage d'être étranger, commode malgré l'inconfort.

 

Mon premier investissement immobilier.

 

Le chien s'appelle Cowper. Affectueux labrador qu'il faut prévenir avant de poser la main sur la porte d'entrée, Cowper incarne l'âme du foyer. Cowper est aussi le nom d'un ingénieur britannique qui, au milieu du XIXème siècle, a mis au point un appareil de récupération de la chaleur des gaz de haut-fourneau, permettant de préchauffer l'air qu'on y injecte. Un « cowper » est une tour où le gaz et l'air, successivement, circulent dans des chicanes pavées de réfractaires. Cette alternance de fluides rappelleront à certains les humeurs des êtres humains, et ceux qui n'hésitent pas devant l'anthropomorphisme feront du cowper un des éléments qui rendent le haut-fourneau vivant. Cela, mon sympathique hôte l'ignore peut-être car le haut-fourneau est à Beyrouth ce que le falafel est à Hayange : un besoin criant. Mais tous nous l'avons bien compris, tant l'animal joue un rôle d'authentique médiateur, recevant les émotions de chacun dans le reflet de ses yeux et de sa truffe noirs. Pacifique maître des lieux qui laisse mon hôte ou moi partir en promenade, personnage étonnamment central du séjour, son absence fut un jour de pluie.

 

Une vue dans le Sud du Chouf. Les comédiens les plus habiles verront la mer. 

 

Ou suis-je revenu pour une voix claire, de celles qui nous font rallumer le chevet pour écrire comme à l'adolescence ? C'est lorsque le son des poèmes résonne dans les claquements de portières des autos, que la clameur de la rue s'estompe à la montée d'un escalier. Alors mon ascension croisera sans les heurter des conversations indistinctes des badauds tandis que mes sentiments suivent une pente inverse. Je réapprends et savoure l'apesanteur qui en résulte. Il y a bien de l'inachevé dans chaque voyage, et certainement beaucoup d'inaccompli dans celui-là. Je déambule dans la nuit pluvieuse à la recherche des odeurs d'essence sur la végétation humide qui continuent à me griser. Mais plutôt que les billets et les coursiers, il faut aujourd'hui compter avec les messages téléphoniques pour prendre conscience du charme langoureux. Quand reviendrai-je maintenant ?

 

« Dieu te préserve d'en rire, Wilhelm ! Sont-ce là des fantômes ? Est-ce une illusion que d'être heureux ? »

 

Les neiges de la chaîne du Mont Liban, qui fondent en ce printemps comme mon vieux cœur à la pensée des amis. Bises à tous !

 

P.S. : le premier qui retrouve l'ouvrage comprenant la citation précédente sans recours aux NTIC (cet acronyme n'est-il pas so vintage?) gagne un repas libanais.

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16 mai 2012 3 16 /05 /mai /2012 22:24

 

 

 

 

 

Chers camarades non germanophones et néanmoins amis,

 

Loin de moi la volonté déplacée d’occulter le cri de rare de Johanna, car celui-ci a toute sa place sur le paradis informatique. Que dire, si ce n’est que la Kronembourg, c’est quand même très suspect : mais il faut avoir vu la brasserie de Strasbourg pour le savoir. Les articles semblent fleurir comme les bourgeons en cette verte saison. C'est la période.

 

 

ste.jpg

 

 

Comme vous le constatez, l’apparence de la région a quelque peu changé. Les genets, envahissantes broussailles totalement inutiles au bon fonctionnement de la Nature (mais qu’en savons-nous ?) nous gratifient de bouquets jaunes d’un goût discutable, les châtaigniers commencent à reverdir et nous gratifient d’un vert plus fluo que les lunettes d’Eva Joly. Observez ainsi le contraste à quelques 1300 et des bananes mètres d’altitude. Dire que fin janvier, lorsque j’ai franchi ce col, j’avais mis une heure et que je tremblais de voir le thermomètre de la GronchonMobile se rapprocher doucement mais sûrement du zéro. Désormais la voiture connaît la route toute seule. Dangereux.

 

bauzon.jpg

 

 

Je ne résiste pas non plus au plaisir de vous montrer que moi aussi (attaque !), je puis travailler le fayard : le fayard est en effet le nom local du hêtre, lui aussi resplendissant à cette époque de l’année.

 

 

fayard.jpg

 

 

Quel plaisir de revenir vers vous en joli mois de mai, alors que tous les espoirs semblent permis ;

 

Grâce à l’élection de François Hollande, Thom-Thom va sans doute être nommé à la tête du SGAE (en cas d'incompréhension, retournez consulter les cours de 2° année que vous avez gardés sous l'oreiller) et changer l’Europe ;

 

Grâce aux concours de la fonction publique, Jojo va réorganiser l’administration territoriale vers une planification efficace tendue avec acharnement vers la réduction du temps de travail ;

 

Grâce à sa maîtrise de la langue de Fayrouz, Nico va devenir le nouvel Albert Londres ;

 

Grâce à son sang-froid et à sa résistance aux moustiques, Théo va faire cesser tous les conflits dans le monde ;

 

Grâce à son caractère intrépide, Maud va dénoncer les ravages de l’impérialisme occidental en Amérique Latine et fonder un groupe avec Manu Chao ;

 

Grâce à sa persévérance en matière d’improvisation éloquente, Antoine va décrocher une bourse de thèse ;

 

Grâce à son talent et à sa connaissance impeccable des séries télévisées, Léa va révolutionner le cinéma américain et faire déferler sur la terre entière des créations fraîches, drôles et décalées...

 

Je sais que j’en oublie. Ils me pardonneront, ou bien ils écriront sur ce blog.

 

Et moi dans tout ça ?

 

 

vaches.jpg

 

Cessez de me regarder avec ce regard bovin ! Car oui, les vaches sont de nouveau de sortie, signe indéniable que le printemps est enfin arrivé sur le plateau ardéchois. Après tout ce temps passé dans d'obscures étables, il faut bien qu'elles ruminent l'herbe verte et non rouge ; le beurre de printemps est paraît-il le meilleur, mais là ce ne pas des laitières je crois bien...

 

Et ce que vous attendiez avec tant d’impatience va pouvoir enfin régaler vos orbites révulsées par une longue attente hivernale à l’ombre des ions informatiques : le mois de mai.

 

wundershon.jpg

 

[Si vous agrandissez vous verrez la tour de  Borne au milieu. La vie est difficile.]

 

Alors, que fais-je ? A quelle destinée me prépare-je ? Malheureusement je l’ignore toujours. J’imagine que vous êtes fort curieux de ma situation professionnelle depuis environ un mois et demi. Sachez que mon réseau Linkedin demeure au point mort, en vertu des efforts involontaires de Thom-Thom pour m’inviter à rejoindre ce simili-Facebook, que même SciencesPo refuse désormais pour créer son propre réseau de gens « in » grâce à l’entreprise d’UMP GrandesEcoles.

L’évaluation du programme Leader sur le territoire du GAL des 3 Sources se porte bien. Nous restons dans l’anonymat pour l’instant mais un site Internet (joie ! Je ne m’en occupe pas !) verra bientôt le jour pour répondre à toutes vos questions. Je puis vous livrer une photo officielle en avant-première.

 

 

cp2mai.jpg

 

 

Voyez que ça a l’air de bosser dur. Tiens ça me fait penser que le portrait va changer.

Pour ne rien vous cacher, ce n’est pas facile tous les jours. Nous sommes trop peu nombreux sur ces 1000km² pour dépenser l’enveloppe gracieusement attribuée et nous risquons fort par conséquent de ne pas bénéficier d’une dotation complémentaire. Qui a dit que les caisses de l'État étaient vides ? En tous cas il me faut passer à une phase opérationnelle très très concrète : rédiger un beau rapport, réunir à nouveau tout le monde et présenter en chaire les résultats très secrets de mon enquête. J’ai récemment confié à Antoine mes déboires d’apprenti sociologue. Je suis tout aussi gêné de la faible pertinence économique de mon rapport. Mais comment faire pour relancer l’économie locale ? J’ai pourtant plein d’idées !

Je vous confierai plus tard quelques retours d’expériences : participer à la tonte des moutons, stimuler le marché de Langogne par la création d’une demande bloquée, soutenir le moral des producteurs en buvant des coups, mesurer l’impact de l’arrivée de Janoé dans 2 semaines sur le développement de la création artistique en basse Ardèche...

 

En attendant, je goute doucement à l’insouciance dans notre beau pays qui paraît-il court à sa perte (pour information, le second tour sur le seul plateau ardéchois aurait été Sarkozy vs Le Pen) tant morale que financière.

Afin de déjouer les pièges du fisc qui risquerait fort de ponctionner leurs frais de déplacement considérables dans ces zones de sinueuses montagnes, les jeunes fortunés de Saint-Etienne-de-Lugdarès ont essayé de changer de vallée.

 

en-route.jpg

 

Pour ce faire, j’ai donc dû -un homme de ma qualité- être initié à l’escalade, étrange pratique sportive (pléonasme) dont le but est apparemment de monter un obstacle, si possible le moins abordable possible, pour ensuite redescendre.

L’objectif était clair. Les Sources de la Loire, que certains d’entre vous connaissent déjà, sises au Mont Gerbier de Jonc.

 

 

gerbier.jpg

 

Il s’agit de la petite butte là-bas au loin. Comme une butte de taupe. Symbole fort de l’identité du plateau, le Mont Gerbier n’est pas inconnu de nos grands-parents qui avaient encore à apprendre le nom de ce genre de lieu. Il s’agit apparemment d’une butte phonolitique (eh ouais...les cours de SVT...), i.e. quand la lave des volcans se refroidit vite eh bah ça fait des gros cailloux mais qui bougent plus et sont scintillants pour qu’on puisse les éclairer et qu’ils reflètent sous la loupe du microscope.

 

Comme nous sommes arrivés quelques minutes plus tard, je vous le montre de près.

 

 

gerbier2.jpg

 

 

C'est bizarre, hein ? Mais bon c'est ainsi, drôle de truc. En tout cas quand je suis sur le plateau ça m'indique le Nord-Nord-Est (on ne sait jamais...). 

 

Tenez, j’en profite même : car comme nous allons vraiment très vite, nous passons de l’autre côté de ces sources, dans le cirque des Boutières. D’aucuns seront peut-être surpris, à contempler ces paysages qui sont quand même loin de chez moi, de se renseigner sur le Tchier de Borée sur wikipedia.

Mais il y a plus mystérieux : le massif du Mezunc (le Mont Mezunc, c’est le truc que vous voyez au milieu de la prochaine photo, à droite de la petite butte du Gerbier de Jonc...c’est le plus haut sommet d’Ardèche ohohoh ça ne rigole plus) est le théâtre plus ou moins régulier et dramatique d’accidents d’avions. Heureusement qu’il n’en passe pas tous les jours. C’est un peu le triangle des Bermudes local. Nul doute que l’activité volcanique ancienne a laissé des traces encore insoupçonnées en termes de magnétisme et d’ondes bizarres qui dérèglent tout ce que notre époque trouble et dissolue a pu générer de superflu par rapport à la bière, seul liquide véritablement nécessaire.

A moins qu’il ne s’agisse simplement de la terrible Burle...

 

 

boutieres.jpg

 

Mais, comme m'a dit un maire d'une commune de ce sympathique cirque : "vivre ici, ça se mérite". 50km au sud, j'en suis encore loin.

Avis aux amateurs... Certains en cherchent apparemment.

 

abraham.jpg 

 

 

Des bisous ! Vous me manquez bien sûr, et nous allons bientôt battre le rappel pour faire je ne sais quoi cet été et cet automne !

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18 mars 2012 7 18 /03 /mars /2012 16:44

Chers camarades et néanmoins toujours amis,

 

Vous attendez avec impatience le récit de mon expulsion du village suite à votre passage. Vous souhaitez ardemment que je décrive comment au cours d’ un meeting politique enflammé du maire, profitant de la tuade qui avait rassemblé la population et suite à laquelle Johnny avait entonné « allumé le feu », comment tout à coup la foule, qui vibrait à l’unisson des slogans de son Leader, a été détournée par un hirsute metteur en scène inconnu au village, qui a rapidement désigné le logement du stagiaire à la vindicte populaire, arguant du fait que celui-ci avait des dents particulièrement longues pendant la pleine lune et qu’il troublait la tranquillité des sœurs par la répétition attestée de pratiques musicales douteuses pouvant être qualifiées de « chansons de Jo Dassin ». Fuyant le chaos, ledit stagiaire a descendu la vallée en une nuit et pris le premier train à Langogne, à 5h et demi du matin, pour se retrouver au soleil de Marseille à midi, où il prit un ferry en direction de Casablanca, où un jeune journaliste brun avait obtenu pour lui l’asile politique auprès de son excellence le Roi du Maroc.

 

Malheureusement, cette chronique ne peut être renseignée outre mesure, car j’ai en réalité trouvé refuge dans les ordres. Les sœurs m’ont happé.

 

eglise.jpg

 

A cette nouvelle, plusieurs jeunes inconnus originaires de régions diverses se sont mobilisés et ont décidé de tout mettre en œuvre pour me sortir de l’univers monacal dans lequel je me destinais après en avoir épousé le cénobitisme dès ma vie temporelle. A l’aide d’un mystérieux guide de haute montagne en manteau rouge, qui s’avérait être un escroc notoire, descendant avéré des époux de l’auberge de Peyrebeille, ces jeunes gens préparèrent l’évasion.

 

Pour ceci, il leur fallait un plan.

 

carte.jpg

 

 

Ils conclurent vaillamment qu’il ne fallait reculer devant aucun péril, et que par conséquent le moyen de prime abord le plus efficace pour organiser cette libération était de prendre le maquis.

 

 

danger-1.jpg

 

Cette équipe, loin de constituer une formidable bande de bras cassés, fit preuve dans sa quête d’un sang-froid exemplaire. Alors que certains théoriciens passent des heures à rechercher les insondables lois de l’astrophysique la plus complexe, que certains intellectuels consacrent des journées entières à analyser avec finesse et curiosité la réception du discours sur l’assistanat, que certains désœuvrés mettent 6 mois de leur vie à rédiger un rapport d’évaluation à mi-parcours du programme Leader sur le territoire du GAL des 3 Sources, ces jeunes gens, dignes représentants d’une génération qui est arrivée trop tard pour regarder l’intégralité de l’Agence Tous Risques, ne reculaient devant rien et réalisaient des prouesses physiques dans des conditions météorologiques extrêmement difficiles.

 

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Passés maîtres dans l’art du camouflage en haute montagne, ils ne tardèrent pas à se fondre dans le décor pour surprendre au maximum les preneurs d’otage, qui s’étaient quant à eux réfugiés dans un couvent labyrinthique dans le but d’égarer les fous prenant le risque insensé de s’y aventurer.

 

Plus d’une fois, suite aux difficultés d’approche et en raison de la présence hostile d’une troupe de théâtre invitant les badauds dans des pièges habilement tendus à coups de filage et de pot-au-feu, l’ensemble de l’équipe fut-elle en proie au doute.

 

 

doute.jpg

 

Car les conditions en altitude sont particulièrement rudes. Ainsi situé la foi devient indispensable à la poursuite de la mission. Il ne faut plus regarder en bas.

 

du-haut.jpg

 

Plus d’une fois, une partie des effectifs fût prise du désir de fuir le vertige lié aux paysages désertiques de la montagne ardéchoise et de retrouver au plus vite le plat pays où le V’Lille permet si rapidement d’arriver au Poste et d’y boire quelques breuvages réconfortants, à la différence des boissons bas de gamme, ersatz de bières, avec lesquelles ils eurent à composer lors du week-end.

 

bieres.jpg

 

Mais par rapport aux sœurs, notre équipe avait un avantage hors du commun. Fervent adeptes du culte du Soleil, nos amis recouraient régulièrement à la méditation pour reprendre des forces. Nourris des rayons d’un astre généreux, ils pouvaient ainsi acquérir la sagesse nécessaire pour déjouer les embûches et éviter les chausse-trappes.

 

contemplation.jpg 

 

Aussi notre troupe réussit-elle finalement, par une ruse subtile, à me secourir. Arrivés à Borne par le chemin des écoliers, ils firent sonner les cloches de l’église pour attirer les sœurs à la messe. Or, la route est extrêmement longue et s’apparente parfois au chemin de croix !

 

borne.jpg

 

Contournant la grand’route qui sépare les deux villages en empruntant, totalement invisibles, la bruyère la plus touffue, nos amis parvinrent à rejoindre Saint-Etienne-de-Lugdarès !

 

jules-en-fuite.jpg

 

C’est ainsi qu’ils purent « libérer ! Leur ! Camarade ! » à la plus grande joie de tous ! Cet exploit réalisé, chacun put dire au revoir au soleil couchant dans un enthousiasme débridé (ou un rhume débridé).

 

enthousiasme.jpg 

 

Et cette fin est assurément très heureuse, car le combat anti-clérical pour nombre d’entre eux se poursuit ! Certains avaient rendez-vous ce dimanche 18 mars place de la Bastille, où l’ensemble des révolutionnaires de leur trempe (plus quelque uns moins audacieux, il faut bien l’avouer) avait prévu de se retrouver pour initier ce qui va probablement devenir un des plus grands événements historiques contemporains, en redonnant aux cœurs meurtris par la chute du Mur de Berlin l’espoir nouveau d’un monde meilleur !

 

melanchon.jpg

 

Bien à vous.

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26 février 2012 7 26 /02 /février /2012 20:58

 

Chers camarades et néanmoins amis,

 

      redoux

 

 

C’est sous un ciel étoilé d’une limpidité qui serait aveuglante si elle n’était nocturne que je vous écris. Et sous le néon de ma cuisine aussi car qui dit nuit claire, dit léger frimas.

 

 

cuisine

 

Je vous avais promis de présenter mon intérieur, voici donc la cuisine et ses murs désespérément blancs que je cherche à remplir d’éléments disparates, allant des dessins de mes petits neveux aux plans touristiques en passant par la bicyclette. Vous noterez la présence d’une quiche lorraine au four. Il y a certaines choses qui ne s’achètent pas. Pour tout le reste, il y a l’Union Européenne : le fanion en haut à gauche est celui du programme Leader, ce qui manifeste bien l’inextricable et malheureuse confusion entre les sphères privé et professionnelle de ma vie quotidienne. Au sujet de l'Europe, j'invite Thom-Thom à nous glisser quelles sanctions l'UE va-t-elle prendre cet été lorsqu'Israël effectuera des raids contre les centrales iraniennes (je rappelle que cette information est confirmée par le Canard Enchaîné ; tenez au passage, j'ai récemment écouté une émission sur "L'Affaire Stavisky", grand escroc au début des années 1930 : à l'époque, le Canard avait écrit "Stavisky a été suicidé. Il s'est tué d'une balle tirée à 3 mètres de distance : voilà ce que c'est qu'avoir le bras long."). 

 

 

Je tiens à rassurer tous les fans, d’ores et déjà nombreux, de la GronchonMobile. Celle-ci se porte bien, malgré le retour du -15°C, car elle a désormais un garage rien que pour elle et une superbe bétonneuse, garage gentiment mis à disposition par les services techniques municipaux, mais chut il ne faut pas le dire trop haut ça pourrait faire des jaloux.

 

Je suis donc en mesure de prendre gaiement le volant et de piloter sur les routes givrées.

Routes givrées qui m’amènent là où le monde culturel se réunit, par exemple à Mende. Vous l’ignoriez, mais me voilà en capacité d’aller à Mende. Qui l’eût dit. Où je suis allé, dans la fort jolie vieille ville, écouter ceci :

 

http://www.myspace.com/onelickless

 

Et j’espère que vous partagerez mon opinion, mais j’ai trouvé que c’était vraiment pas mal. Voici donc pour ma première sortie culturelle. Je n’étais pas seul, loin de là, ni au départ, ni au bistrot. Eh oui c’est possible. N’oublions pas que la Lozère est un département important, où d’ailleurs se forgent des destins de président à tire-larigot : Jacques Chirac et François Hollande, pour ne citer qu’eux... Voilà qui me rappelle que le Salon de l’Agriculture est imminent. J’espère que les parisiens parmi nous ne se cacheront pas pour une fois et prendront le temps d’y aller et de plébisciter les productions du plateau ardéchois. Nous comptons sur vous. Moi j’y vais pas. Je bosse !

 

Probablement m’attendez-vous au tournant sur cette question, mais lequel ? Il y a tant de virages dans ces routes de montagne... Passablement échaudés par l’affligent manque d’imagination dont témoigne cette dernière blague, vous trépignez mais je resterai muet comme une carpe dans un ruisseau à qui l’on aurait pas demandé de s’exprimer ! Néanmoins, je peux vous glisser une chose : la « démarche évaluative » est lancée. Votre serviteur, ayant été invité à faire les choses dans les règles de l’art, est armé

  • de questions évaluatives (par exemple : « la stratégie mise en œuvre par l’actuel président était-elle pertinente pour démoraliser les concitoyens ? ») ;

  • de batteries d’hypothèses relatives à ces questions (par exemple : « on peut dire que cette stratégie était pertinente si les citoyens sont démoralisés au point d’être prêts à voter à nouveau pour lui ») ;

  • des indicateurs très très objectifs pour mesurer la réalisation de ces hypothèses (par exemple : la consommation d’anti-dépresseurs, les interventions du samu social, l’audience du JT de TF1) ;

  • et enfin, car me diriez-vous, un indicateur ne mesure rien de plus que ce qu’on veut lui faire dire, des éléments de langage propres à préparer le difficile face-à-face avec les Français en leur posant les bonnes questions (par exemple : « monsieur Mathieu est-ce que ce soir vous regrettez votre geste ? »).

Maintenant que je vous ai livré l’ensemble des techniques du métier d’évaluateur, vous n’avez plus qu’à adapter la procédure à toute politique publique que vous jugeriez digne d’intérêt. Petit conseil pratique, gardez à tout moment la capacité de justifier vos choix par rapport aux préférences du donneur d’ordre. Car c’est là la grande question qui va déterminer beaucoup de choses : qui la demande et pourquoi ? Non content de m’être, par ces derniers paragraphes, mis au chômage de longue durée en fournissant à la concurrence que vous constituez sur le marché du travail un supplément significatif de capital humain (que vous allez bien entendu faire fructifier dans une attitude non coopérative), je vais derechef (dédicace à Nico) contribuer à me mettre au chômage par anticipation en avouant que pour l’instant, je suis dans une phase d’expectative : toute ma trame d’évaluation dort dans un ordinateur, je la peaufine et anticipe sur les entretiens à mener, car je dois attendre précisément l’étape de confrontation de ladite trame aux préférences des donneurs d’ordres. Pour faire simple : j’ai fait en fonction de ce qui a été dit pendant 2*3 heures, est-ce que tout le monde peut être d’accord avec moi ? Est-ce que le temps ne va pas en décider autrement ?

 

Comment faire ?

 

commentfaire.jpg

 

Mystère.

Ce serait néanmoins positivement incroyable (Dieu que cette tournure me paraît empruntée aux traductions des romans russes du XIX° siècle). Qu’en pensez-vous ?

 

Sur un plan plus strictement personnel, je vous informe que mes parents ont passé deux jours chez moi, et en sont repartis enchantés. Il semblerait que le retour à l’air pur des cimes leur ait fait le plus grand bien. Preuve en outre que l’endroit est tout à fait idéal pour accueillir des touristes en villégiature.

 

Mais malheureusement, de nos jours, la publicité écrite ne suffit plus. Le chaland exige de l’image comme produit d’appel ! Je me vois donc bien contraint d’ajouter quelques menus photographies.

Le printemps arrive à grand pas et nul doute que les amoureux d’activités de pleine nature que vous êtes attendez de savoir si j’ai désormais le loisir de me casser la figure sur les sentiers escarpés.

 

 

cassagedegueule.jpg

 

 

J’en profite pour signaler que j’ai repassé en sens inverse le col de la Croix de Bauzon. Cet allez-retour m’a paru incroyablement court par rapport à mon premier aller, ce qui m’étonne encore. Comme quoi les premiers instants passés dans de nouveaux endroits, qui vont par la suite devenir familiers, sont toujours magiques et me font penser à la façon dont, enfants, nous appréhendions chaque événement – nécessairement nouveau et extraordinaire. Les personnes sceptiques à l’idée qu’il puisse faire 16°C ce samedi sont priées de se signaler.

 

 

croixdebauzon.jpg

 

Et pour que vous compreniez pourquoi Janoé adore l’Ardèche, je joins la photo suivante : en bas se trouve la grotte Chauvet (tu devrais faire cette promenade Jaja c’est magnifique ; d'ailleurs es-tu déjà allé dans la grotte magique, celle où on peut se balader, c'est impressionnant), près de Vallon Pont-D’arc, que vous retrouvez ici. C’est apparemment très touristique en été, avec plein de gens hollandais qui vivent dans des camps retranchés. Mais c’est loin de chez moi, c’est côté "Ardèche méridionale".

 

 chauvet.jpg

Je cesse désormais de vous abreuver, car je commence une collection de bières locales. Evidemment, les premiers arrivés seront les premiers servis, et je ne préjuge en rien de la qualité desdites bières. Ce qui me fait penser que je pourrai aisément intégrer les produits gastronomiques locaux dans mes articles. Probablement serez-vous bientôt servis.

 

Bises à tous.

A bientôt !

 

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5 février 2012 7 05 /02 /février /2012 11:51


 

« Fondé sur une connaissance méthodique et désintéressée de l’action publique, le jugement évaluatif possède une crédibilité et une autorité supérieures à celles du jugement spontané. »

 

A tous ceux qui pensent que les cabinets de conseil ne sont nullement désintéressés financièrement par l’action, je vous invite à monter dans la nouvelle GronchonMobile pour venir réaliser l’évaluation à mi-parcours du programme LEADER sur le territoire du GAL des Trois Sources. Par contre, ceux qui considèrent la rémunération ordinaire d’un stagiaire comme un intéressement financier sont priés de rédiger des mémoires de recherche, merci. Cette dernière phrase est sans doute le début du fascisme.

avant départ

 

Cette photo est importante car ma maman y tenait.

Vous ne me connaissiez pas cet anorak rouge : sachez qu’il s’agit là du premier élément de changement d’époque, car les habitants de Saint-Etienne-de-Lugdarès ne me connaissent pas sans lui.

A cet anorak revient effectivement la délicate mission de m’abriter un tant soit peu du froid qui sévit dans ma 

Je suis donc parti, un beau matin lorrain (i.e. brumeux), sur l’autoroute du Soleil qui était jusqu’alors synonyme de vacances.

De vacances il en fut (tiens c'est rigolo j'avais écrit "il en fût", sans doute ce gracieux tropisme est-il lié à une fréquentation du Poste plus excessive que de raison - mais est-ce seulement possible ? je demande votre avis) question à Chalon-sur-Saône, à Lyon puis à Lagorce ; je remercie mes hôtesses successives (ahah vous aimeriez savoir de qui il s’agit hein !). Abandonnant lâchement Janoë à La Ferme de Lagorce, sympathique lieu occupé par de sympathiques gens, je poursuivais ma route seul, vers ma destination finale.

Pour arriver à Saint-Etienne-de-Lugdarès, j’ai coupé au plus court, prenant évidemment tous les risques : passer par le col de la Croix de Bauzon (1308 mètres). A chaque kilomètre, une pancarte indique la distance au col et la pente moyenne. Tel un coureur cycliste, la GronchonMobile tire la langue...elle ne sait pas ce qui l’attend une semaine plus tard.

 

ascencion.jpg

 

Tenez, histoire de rendre ce blog plus ludique et interactif, je vous invite à chercher la chèvre sur la photo suivante.
Pas facile, mais elle était bien sur la route du col. Sympathique animal, digne héritière de la chèvre de m. Seguin, noble représentant de son espèce, éprise de liberté mais assurément effrayée de se heurter si violemment au sol bitumeux d’une route incongrue, qui vient barrer de sa laideur la promenade immémorielle de la précitée chèvre.

 

chevre.jpg

 

 

Je vous passe les photos des premières neiges, au col, qui m’ont fait craindre le verglas. Citadin que je suis, citadin je resterai. L’hiver n’était alors pas encore réellement arrivé, puisqu’il ne faisait que -5°C. Il n’y a plus qu’à descendre en roue libre parce qu’on est pas à 10 minutes près, d’autant que je suis en avance sur le timing, qu’il fait encore jour et que le gasoil coûte cher malgré tout.

 

Que je vous explique. Ma responsable m’accueille, me fait faire le tour de mon logement de fonction (eh oui...je vous le présenterai tantôt, vous pouvez venir il y a des lits et un canapé à fleurs dépliable, et j’aurai courant mars une colocataire qui viendra renforcer l’Office de Tourisme, c’est chic) et des bureaux de la communauté de communes, de la mairie, du GAL (vous savez d’avance que ce sont les mêmes).

Le lendemain, rien de plus simple que de descendre à Langogne (20km) pour dévaliser les magasins en mixer pour la soupe, patafix pour les cartes postales, farine, sucre, thé, café, fruits secs et légumes pour tenir un siège...

Car contrairement à tout le monde au village, je ne suis pas spécialement équipé pour la neige « ah bon tu n’as pas de pneus neige ? ». Ça par exemple. Voilà qui mérite une enquête fouillée.

larcenet1.jpg

 

larcenet2.jpg

 

Non je plaisante car ça c’est pas passé ainsi (le premier qui donne la référence musicale gagne une carte postale ; il est interdit de copier/coller sur Google, c’est pas du jeu), mais j’y tenais quand même. Les BD du Retour à la terre sont les seules que je me suis permis d’emmener.

 

En fait l’hiver est arrivé le mardi matin quand j’ai écarté péniblement les volets devant ma porte.

 

hiver.jpg

 

Sachez que depuis qu’elle a vu cet amas de neige s’accumuler et surtout senti la température diminuer aussi fortement, la GronchonMobile est plus chagrine que jamais. Comme me l’expliquait tout à l’heure m. Gonzales, garagiste de son état à Langogne, « c’est normal avec les diesel : le froid rend le gasoil plus épais, donc quand le moteur demande trop, le gasoil ne passe pas et le moteur s’arrête » : tel est le principe de la panne quand il fait -14°C dehors. Fort heureusement, la RonchonMobile redémarre toujours, après un petit temps à faire la tête où, ma foi, on est avec ses feux de détresse sur le bord de la route enneigée, et on a l’air d’un con, ma mère (je n’ai pas besoin de repréciser les règles du jeu). Un peu à mon image, elle n’aime pas qu’on lui en demande trop le matin. Une matinée pour faire un aller-retour à 20km. Samedi, par contre, je n'ai pas réussi à la faire aller jusqu'à Langogne où l'Eldorado m'appelait (médiathèque, piscine, Intermarché). Je suis remonté à 20km car au-delà elle s'arrêtait. Aujourd'hui, elle ne démarre pas. La pauvre. Ça m’apprendra.

Je sais que vous attendez plus que la construction d'un personnage mythique (oui, la GronchonMobile c'est peut-être un nom un peu pourri, je suis ouvert aux autres suggestions), 

Ca viendra. 

En attendant, je contracte mon épine dorsale.

 

Bises à tous.

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7 mai 2010 5 07 /05 /mai /2010 17:29

Bonjour à toutes et à tous,

 

Bien que je ne souhaite pas occulter l’article fort pédagogique de Thom-Thom (depus, tout le monde s'est lâché c'est vrai mais ca vous donne une idée du temps qu'il me faut pour charger des photos...), je glisse subreptiscement un article avec de jolies photos, pour partager avec vous ce qu’est la montagne libanaise au printemps.

Grand comme la Gironde (cf wikipedia), le Liban est constitué (d’ouest en est) d’une plaine littorale, d’une chaîne de montagnes (le Mont Liban), de la plaine de la Bekaa (un fossé d’effondrement, sur le plan géologique), puis d’une autre chaîne de montagnes (l’anti-Liban), laquelle fait office de frontière avec la Syrie. Aussi, quand on est sur la côte et qu’on monte, çà grimpe très vite, très haut. Et ca donne de beaux paysages. Nous avons donc loué une modeste voiture (une Kia toute rouge, pour être précis) pour une modique somme (20$ par jour, personne n’a trouvé moins cher à Beyrouth) et nous sommes partis, à nos risques et périls, sur les étroites routes de montagne ravinées par le gel annuel.

L’histoire ne retiendra pas l’heure passée dans les embouteillages pour sortir de Beyrouth.

 

 

moutons.jpg


Joke.



L’histoire retiendra que juché sur le flanc de la montagne, le bourg de Qartaba est inaccessible 4 mois par an en raison du verglas.

 

qartaba-de-loin.jpg



A Qartaba, les morts sont bien installés. Selon la grand-mère de notre hôte, ils disposent « du plus beau site du village ». Etonnant.

 

cimetiere.JPG


Cela dit, les vivants aussi ne sont pas mal lotis. J’aimerais bien bénéficier de cette piscine en été.



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Car la majorité des habitants ne réside pas au village, cas-type du bourg de montagne libanais. Jusque dans les années 1950/1960, le village était occupé toute l’année, l’agriculture était la principale activité, la population faible. Aujourd’hui, une dizaine de personnes y vivent pendant l’hiver (quand la route avec la côte est coupée), et il y a entre 10000 et 20000 personnes pendant l’été. L’été, tous les citadins (qui habitent surtout à Jounieh ou à Beyrouth) viennent prendre un peu le frais dans leur résidence secondaire. Ils reçoivent le renfort des « Libanais de l’étranger » (ces « Libanais de l’étranger » représentent approximativement le double de la population libanaise vivant sur le territoire), qui -si possible- ont gagné de l’argent, et peuvent donc acquérir des résidences cossues, avec piscine sur la terrasse et vue sur la vallée.


Mais peut-être êtes-vous agaçés de voir que le sciences-po ne se départit jamais de son oeil de sociologue. Il est temps de prendre ses chaussures de marche et un peu de hauteur.


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Du haut de la falaise, le seigneur des anneaux local contemple la vallée. Il veille paisiblement sans voir le fond de la gorge.


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Dans les endroits plats (ou plutôt, aplatis par la main de l’homme, principalement au XIX° siècle et l’effort des paysans maronite surtout mais pas uniquement), l’agriculture est possible. Vous noterez la présence de « la petite mosquée dans la vallée » ; une mosquée chiite en l’occurence (à la montagne, les villages sont assez « homogènes » sur le plan communautaire : Qartaba est habité par des chrétiens, le village d’en face par des chiites). Caractéristique : les grecs-orthodoxes et les sunnites sont peu nombreux à la montagne ; naguère, ils habitaient davantage dans les villes de la côte.


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Dimanche de bon matin, nous nous rendons à la source du fleuve Adonis. Adonis, comme le bel Adonis. Eh oui, il s’agit d’une croyance phénicienne à l’origine. L’amant d’Aphrodite était tranquillement à la chasse dans le secteur quand un sanglier eut raison de sa personne. Pauvre de lui.

C’est donc le fleuve Adonis qui a creusé cette vallée, probablement aidé par quelques évènements géologiques que je n’expliquerai pas car je ne les connais pas. Avec les sources qui la traversent, cette vallée est l’une des plus arrosées (donc des plus vertes) du Liban.


Mais grimpons un peu, histoire de placer quelques clichés avant de repartir.



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Je vais faire le panorama (pas de film, trop dur).


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Qartaba est donc le village de l'autre côté, en face. Juste en dessous, de beaux cadrillages pour une agriculture intensive à plus de 1000 mètres d'altitude : la montagne libanaise produit des fruits et des légumes en quantité (pommes, olives, tomates, poires... et d'autres que je connaissais pas comme les nèfles).

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Au loin, la mer. Ca vous donne peut-être envie de vous baigner ?


En faisant cette promenade, nous avons croisé une petite famille qui se rendait à une salle des fêtes en altitude pour le pique-nique dominical. Nous croisons sur un chemin de terre une voiture qui passe, puis fait marche arrière. Dans la voiture, un monsieur, sa femme, ses trois filles derrière avec le petit dernier sur le genoux. Le monsieur nous demande ce qu’on fait là, si tout va bien, si on a de la famille dans la région, si on a besoin de quelque chose, avant de repartir. C’est juste surprenant de voir la dame tenir le fusil de chasse (déplié) à l’extérieur de la fenêtre passager (sinon ca ne rentre pas). Le plus drôle est quand elle remarque que le canon est pointé sur vous par mégarde et dit « oh, sorry » en roulant les "r".

En famille, le dimanche après-midi, on apprend à tirer dans la nature. 


Légèrement traumatisés, nous avons heureusement trouvé un endroit où nous reposer.


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Sympa le canap' à cet endroit : tout est possible.


Et pour que le week-end soit complet...



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A bientôt !

J’espère trouver le temps d'ici peu pour tout autre chose : les élections municipales.

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8 mars 2010 1 08 /03 /mars /2010 09:37
Je vous avais quitté sur les hauteurs du Krak des Chevaliers, alors que vous vous demandiez comment faire pour rentrer à Homs puis aller à Hama. Cette question n’est pas si anodine. Quand il n’y a pas de bus dans le secteur, comment faire pour éviter l’individu qui vous demande 800 livres syriennes (16€) pour vous faire faire 30km ? Première étape : rencontrer des voyageurs qui sont là par hasard (un couple de Polonais, accompagnés par un Égyptien). Votre nouvel ami Égyptien prend en charge la négociation avec le chauffeur d’une camionnette, et la scène s’apparente à un sketch : votre petite troupe descend à pieds la route du village, et la camionnette revient à l’assaut de la petite troupe tous les 300 mètres. Finalement, au bout du 4° essai, un accord est conclu : pour 15 livres chacun, tout le monde est amené à l’autoroute à 5km. Pour fêter cette victoire, assis dans la camionnette, vous échangez des pâtisseries achetées à Palmyre contre quelques conseils sur les monastères de la région qui accueillent les voyageurs gratuitement. Une fois au bord de l’autoroute, quoi de plus facile d’arrêter un minibus qui vous emmène à Homs, pour seulement 60 livres chacun ? Je l’ignore.
Un changement de minibus et deux heures de route plus tard, vous voici à Hama. Un jovial chauffeur de taxi vous emmène à un hôtel où il espère toucher une commission (pas de chance, on en choisira un autre) ; il laisse sa carte : « Mohammad, taxi driver » avec un numéro, écrit au dos d’une carte de fast-food... « J’ai conduit le groupe au Krak des Chevaliers, les Français étaient contents, ils ont dit Mohammad est très bien, merci, merci, bonsoir monsieur ». Les propositions sont interchangeables.

C’est à Hama que j’ai entendu un homme me dire « I can’t say why, but Lebanon is a better country ». Si c’était pour le climat, cet homme me l’aurait dit, je pense. Je vous laisse donc réfléchir à la question.

Comme beaucoup de Syriens, il avait fait son service militaire au Liban, à une époque où l’armée syrienne occupait le pays. Pour le dire succinctement, la Syrie a été un des grands acteurs des guerres du Liban de 1975 à 1990, mais aussi de « l’après-guerre » puisque ses troupes sont restées. L’armée syrienne a commis beaucoup d’exactions, sur lesquelles je ne m’étendrai pas car elles sont décrites dans les livres d’histoire, mais aussi et surtout imprimées à jamais dans le coeur des gens. Dire que l’on est allé visiter la Syrie déplait souvent (encore une fois, ce n’est pas parce que le climat libanais est meilleur).

Autre parenthèse importante, sur la ville d’Hama cette fois-ci. Hama dans les guides touristiques, c’est surtout les norias sur l’Oronte. L’Oronte est un fleuve, les norias des roues à eau utilisées dans l’Antiquité pour l’irrigation.

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C’est également un palais, le palais Azem, fort joliment restauré.

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Et un parc de la citadelle, d’où vous avez une vue imprenable et où les gens pique-niquent en toute quiétude. http://lh4.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3G2_i94Z7I/AAAAAAAAAVs/uO7gFfAOEME/s640/DSC00999.JPG
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La vieille ville est toute petite et semble avoir été choyée du point de vue restauration. Et pour cause, la ville a souffert. En 1981, devant l’importance prise par les frères musulmans dans cette ville à majorité sunnite, le général Hafez el-Assad (le père de l’actuel président, si vous vous rappelez) a choisi la manière forte : bombardements, destructions au bulldozer... Les estimations du nombre de morts vont de 10 000 à 30 000.

Aussi n’y a-t-il pas beaucoup de choses à voir pour les touristes d’acide que nous sommes (celui qui comprend la blague gagne un chawarma) ; une fois pris notre sandwich, nous nous rendons à Alep dans un beau et grand bus, avec en prime un verre d’eau, une friandise, et l’équivalent turc de Louis de Funès (dans la campagne anatolienne des années 70) doublé en arabe, quelle aventure!

Pour ceux qui n’auraient rien compris à notre périple, je vous suggère d’observer rapidement cette carte de la Syrie. http://www.linternaute.com/voyager/destination/syrie/carte_syrie.gif

Et maintenant, Alep. Si, si, ca vous dit quelque chose Alep. Comme Damas, Alep revendique le titre de plus vieille ville du monde. Dans la région, on se bat pour avoir la ville ou l’alphabet le plus ancien, cela pour vous rappeler que nos ancêtres les gaulois n’étaient qu’une bande de barbares, et que les celtes qui les ont envahis plus tard ne valaient guère mieux. Pendant que nous batifolions à la recherche de sangliers et de potion magique au fond d’une forêt armoricaine, à Alep les gens écrivaient mieux que Proust.

Alep est la ville principale du nord-ouest de la Syrie, chef-lieu du gouvernorat du même nom. En 2009, La ville compte 1 693 803 habitants. Le nom de la ville viendrait de « halab Ibrahim » (Abraham a trait). Située au coeur d'une région prospère, c'est une des plus vieilles villes du monde. Cité disputée, elle occupe une position stratégique entre l'Anatolie et le plateau syrien. Dans les années 1950, le gouvernement envisagea de raser la vieille ville, l'un des principaux carrefours commerciaux de l'Orient pendant 4 500 ans. Mais l'opposition tenace de magistrats, d'architectes et de mécènes fit échouer ce projet. Le centre de la ville a été classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco en 1986.

Rassurez-vous, ceci, je ne l’ai pas écrit, j’ai juste copié/collé l’article de Wikipedia, c’était pour voir ceux qui suivent.
 
Après l’habituelle et fastidieuse recherche de l'hôtel (« bonjour on est 3 pour 2 nuits, on peut voir la chambre ? c’est un peu cher non oui au revoir etc etc » : ca c’est du vocabulaire qu’on devrait apprendre en cours d’arabe, ou alors étudier les textes classiques je ne sais pas), nos premières images d’Alep sont nocturnes. Nous commençons par le quartier chrétien voisin.
http://lh5.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3G3bp0NCDI/AAAAAAAAAV4/igCGGhjRIxI/s512/DSC01002.JPG Vous reconnaissez tous la rue de Béthune.


http://lh5.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3G3iUb-nuI/AAAAAAAAAV8/mHtFi8GAAGY/s512/DSC01003.JPGUne église maronite (pas n’importe laquelle non plus vous vous en doutez).

Mais allons vite nous coucher car la journée du lendemain sera chargée : il s’agit de déambuler dans la ville, dans les souks, de visiter la citadelle. Bref, il y a moults belles choses à voir. D’ailleurs, nous avons lu dans un Express de novembre 2009 qu'avec était dans les « 22 destinations de la rédaction pour 2010  » ou quelque chose comme çà. Si çà peut vous rassurer sur la valeur de ce classement, sachez que Metz ou Nantes y figurent également ; la description d'Alep est un monument de propagande bien-pensante et de publicité mensongère. Je me souviens encore de certains passages « un régime résolument laïc » (sans doute pour dire : ne craignez pas les méchants barbus et les femmes en burka, car autrement je ne vois pas l’intérêt de le dire), la ville « sortie des remous dus à la poigne des Assad père et fils » (il faudra m’expliquer ce que sont des remous causés par une poigne, je n’ai pas bien compris)...il faudra aussi me montrer les restaurants de luxe en bordure de la citadelle, pour l’instant ils sont encore en travaux. Le tout bien entendu suivi de quelques poncifs sur l’artisanat des souks. Je ne veux pas être sévère, mais dans les souks on ne vend pas souvent sa propre production artisanale : les gens ont plusieurs métiers pour gagner assez d’argent, le soir ils enfilent des pierres (qui sont fabriquées en gros et envoyées partout en Syrie) sur des fils et vendent de beaux colliers (c’est vrai c’est beau) à 1500 livres (30€), 10 fois le prix de revient, en été, quand il y a des touristes européens. Comme on y connaît rien, on achète l’échantillon de savon d'Alep (très parfumé) à 150 livres, comme tout le monde (la preuve, c’est qu’on achète le même à Damas). Le pire étant peut-être que le touriste s’amuse follement au jeu du marchandage, mais assez de médisance.
N’écoutez pas l'Express, allez voir la citadelle, elle est splendide.

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Vue du dessus. http://lh4.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3Gy3lKQH9I/AAAAAAAAATw/cSU0l5j0B1w/s640/DSC01041.JPG


L’intérieur de la citadelle. http://lh3.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3GwoGoluiI/AAAAAAAAASk/UFOKGhXduEE/s640/DSC01060.JPG

Alep a, comme Damas, sa grande mosquée, mais celle-ci est bien entendu de dimension inférieure et n’a pas la même histoire. Cela dit,...

http://lh5.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3Gr-RIqsqI/AAAAAAAAAQU/Ra9WecI7Sgo/s640/DSC01109.JPG

Le dernier jour, nous nous en fûmes voir la basilique Saint-Siméon, ou ce qu’il en reste, dans la campagne proche. Cette route nous permis de constater que dans les petits villages de Syrie, loin des lumières des souks restaurés des grandes villes, règne une pauvreté visible.

http://lh4.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3GlRud0MAI/AAAAAAAAANI/L3sk1fQUdCA/s640/DSC01180.JPG

http://lh4.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3GtMNOmcaI/AAAAAAAAAQ8/RjxqMnQABZA/s640/DSC01129.JPG

Saint-Siméon était un berger original du V° siècle, qui a légèrement dévié de son métier initial. Il a passé une grande partie de sa vie, ascète exemplaire, juché sur une colonne en haut d’une colline. Il y bénéficiait à n’en pas douter d’une vue imprenable sur la campagne avoisinante. Probablement y souffrait-il du froid également. Un monastère jouxtait la basilique, qui fut longtemps un lieu de pélerinage. Tout cela pour vous rappeler que jusqu’au VIII° siècle de notre ère, le « centre de gravité » (notamment démographique) du christianisme était Antioche (ville du fameux sandjak d’Alexandrette, que la France mandataire a donné à la Turquie en échange de sa neutralité dans la Seconde Guerre mondiale, et qui est indiquée comme faisant partie du territoire syrien sur les cartes locales encore aujourd’hui).

Il resterait beaucoup à dire et à montrer sur Alep-pour-les-touristes, mais je vais m’arrêter là : vous ne verrez point les immenses souks, le musée archéologique, la gare routière de nuit, le dernier restau et tant d’autres choses encore... Sachez seulement que nous sommes repartis dans un bus de nuit -départ à minuit d’Alep- pour passer un samedi soir de folie : 3h de route en Syrie dans le noir total (et quand tout le monde dort, vous vous demandez aussi si le chauffeur n’a pas envie lui aussi de piquer un petit somme), puis rester de 3 à 5h entre les deux frontières et les différentes formalités, et enfin finir la route au Liban, pour arriver à 7h du matin à Beyrouth.

I can’t say why...
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19 février 2010 5 19 /02 /février /2010 12:39

Eh oui les amis : votre sympathique correspondant au proche-Orient s’est rendu pour vous (et pour lui aussi) dans un pays à la réputation sulfureuse. Mais d’où lui vient celle-ci ?

http://www.rue89.com/files/20080712syriesarkozyinside.jpg

L’homme à gauche est le président de la République Arabe de Syrie, Bachar el-Assad. Par contre, je ne sais pas qui est l’homme à droite. Si quelqu’un peut me renseigner, je le tagerai sur facebook.

Autant vous dire que ce n'est pas forcément de gaieté de coeur touristique que je me suis rendu en Syrie, pour diverses raisons. Il y a en premier lieu le caractère autoritaire du régime, et il y a en second lieu la relation "particulière" entre le régime et mon pays d'accueil, avec un passif très, très lourd. Alors bon. Je regrette presque d'écrire là-dessus. Mais mes scrupules,... Au passage, il manque une ou deux photos à l'article, je le complèterai peut-être un jour.


L’homme à gauche se retrouve sur des photos, des posters géants, des pare-brise de voitures. Le régime ne verse cependant pas dans le culte de la personnalité. Comprenez : on ne voit pas le président aux champs, avec sa famille, tenant les armes, dans une usine, avec un livre...même si son père est un peu présenté comme le père de la Syrie moderne.

http://covers.openlibrary.org/b/olid/OL12638784M-M.jpg?default=false

Le général Assad, c’est Hafez el-Assad, le père de Bachar. Hafez a pris le pouvoir en 1970 suite à un coup d’Etat, et l’a gardé jusqu’à sa mort en 2000. Pour plus de renseignements sur les 20 premières années du régime baathiste, je vous engage à lire cet ouvrage, au demeurant éclairant sur les relations régionales. Ophtalmologue, Bachar faisait tranquillement ses études à Londres et semblait n’en avoir cure quand il a fallut prendre le relai. Finalement, plus de 9 ans plus tard, il est toujours à la tête du pays.

Ceci dit, vous êtes sur ce blog pour que je vous fasse rêver.


Commençons donc par Damas. Non sans vous être fait gruger par le taxi, vous vous faites déposer à l’entrée de la vieille ville et commencer à flâner. Surprise : l’Alsace a emprunté certains traits à l’architecture damascène ; d’emblée, le chauvin n'aura pas fait le voyage pour rien.


http://lh6.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3GZgi-u1sI/AAAAAAAAAGE/ijO4Ydg7xko/s640/DSC00749.JPG

Blague à part. Le monument le plus célèbre de Damas est sans nul doute sa grande mosquée, la mosquée des Omeyades. Qui sont les Omeyades ? Encore une fois, je m’abstiendrai d’explications historiques par trop longues, mais sachez que cette mosquée est un important lieu de pélerinage, notamment pour la communauté chiite. Il n’est donc pas rare de croiser dans la mosquée des gens venant du Golfe avec des petites pancartes (ceux-là sont généralement sunnites) ou des groupes d’Iraniens (ceux-ci étant chiites).

http://lh4.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3GdwcWV0pI/AAAAAAAAAIw/T2dIThFdbbw/s640/DSC00797.JPG
http://lh3.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3Ged7DqH5I/AAAAAAAAAJQ/JVjTeOUIf5Q/s640/DSC00806.JPG
http://lh6.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3Gei2HFufI/AAAAAAAAAJU/HLE7bIAWvN8/s640/DSC00809.JPG


A ce moment, je réalise que mon récit sera infini si je vous décris par le menu tout ce que nous avons vu et pris en photo. Sachez seulement que la vieille ville de Damas respire le calme et l’exotisme que tout touriste de base vient chercher à l’aide de son guide du routard. Plus succintement, c’est vraiment joli. Quelques clichés :

1/ Les souks couverts
http://lh6.ggpht.com/_KowF7bklfgQ/S3GbzqaKVbI/AAAAAAAAAHk/UoiKi1_Rrs4/s512/DSC00778.JPG

2/ La cour du palais Azem, ma résidence secondaire pour le printemps

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3/ Le hammam que j’ai fréquenté (gant de crin obligatoire)



Mais trève de plaisanteries : à peine avons-nous eu le temps de manger dans quelque restaurant classieux que nous voici partis sur les routes du désert syrien. Direction Palmyre, au nord-est de Damas. 2H de route mais surtout une heure à attendre car le bus est en panne. Au milieu du désert.
A Palmyre, point de dunes de sable fin, mais un sol rocailleux, du vent, des bédouins qui vendent de faux bijoux en vous parlant anglais. Palmyre, c’est une ville toute en béton, à l’organisation géométrique et construite après la Seconde Guerre mondiale.
Palmyre


Mais Palmyre, c’est surtout un site archéologique exceptionnel, classé à l’Unesco etc. C’est  immense. Vous vous y promenez dans une atmosphère de désolation causée par le froid, le vent et le caractère sacré du lieu.
Tombeaux

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Depuis l'intérieur du Temple de Baal
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Je me répète, le site est gigantesque et je ne mets que quelques photos, mais ca laisse songeur. Il paraît que. Il paraît que, dans le temps (au temps de nos ancêtres les gaulois, jusqu’à 2/3 siècles après J.C.), Palmyre était une énorme cité de 200 000 habitants (sachant que Rome à son maximum, c’était 1 million de personnes). Le climat était plus doux. L’oasis qui jouxte le site était bien plus grande, et tempérait davantage la rigueur du climat et de la géologie désertiques. Aujourd’hui, la sensation est un peu étrange : on se balade au milieu des ruines et on essaye d’imaginer les lieux il y a deux millénaires ; forcément, on y parvient pas et on se dit « flûte de zut, c’était grouillant de vie ici il y a quelques siècles, que ne suis-je moi aussi aspiré dans l’éternel flot de l’histoire, c’est un sacré foutoir ».

Mais trève de plaisanteries, un voyage hardi nous attend : en une journée, il s’agit de visiter le musée de Palmyre, retraverser le désert syrien en direction de Homs, du Krak des chevaliers, et de Hama.

Dans le froid matinal, vous vous réfugiez au musée archéologique qui est à peine plus chaud que l’extérieur et là, c’est à nouveau malaise dans la civilisation. Le musée, vraisemblablement construit dans les années 1960, sonne creux. Et pourtant il y a plein de choses. Les salles sont immenses, les objets tout petit, certaines vitrines sont vides. C’est embêtant car encore une fois, vous pressentez qu’il y a anguille sous roche : il y a des monuments funéraires, des bijoux, des pièces de monnaie, des statuts etc etc... Vous en appelez à votre habitus bourdieusien mais rien n’y fait : il ne s’agit pas d’amour de l’art. Encore une fois, vous partez dans des rêveries infinies sur la vie à cette époque (est-ce que moi aussi j’aurais été représenté avec un rameau d’olivier parce que j’étais un riche marchand qui exploitait les travailleurs ?).

Mais il n’y a pas le temps de flâner, rendez-vous à la gare des minibus pour Homs, cité industrielle du centre du pays. Les minibus en Syrie et au Liban, c’est toute une histoire. Quel est l’horaire ? On attend que le minibus soit plein (13 personnes en l’occurence) et on part. Tant pis pour vous si vous êtes collé à la fenêtre dans laquelle le vent s’engouffre, ou si votre voisin est un imposant militaire qui prend la moitié de la place du voisin par la force des choses, il faudra tenir 2 ou 3h comme çà, à voir défiler les cailloux et de temps en temps, un berger avec ses moutons qui paissent paisiblement au bord de l’autoroute surfréquentée (3 véhicules par heure). La Syrie est un pays à la géographie riche. Il faut traverser la montagne et la neige pour arriver à la première destination.
De là, seconde difficulté : comment aller au château (Qalat el-Hosn en arabe pour ceux que çà intéresse) ? Gardez-vous de demander le chemin à ces deux individus en blouson noir qui vous demandent vos passeports (« ana bolice » : en gros fais ce que je dis). Après un chawarma huileux (je préfère de loin les sandwichs libanais, mais c’est un autre débat) et un thé bien chaud, il faut prendre un bus de ville pour se rendre à l’autre gare routière. Puis nous reprenons un minibus avec qui nous négocions le voyage jusqu’au château. Tout va bien. Au terme de cette moitié de périple, nous sommes enfin arrivés à un des châteaux croisés les plus célèbres, et je ne vous écrirai pas ce que Lawrence d’Arabie ou d’autres personnages historiques plus ou moins grand-guignolesques ont pu dire de ce château : vous ouvrirez le guide du Routard de la Syrie bien assez tôt pour le savoir, et au mieux, vous ne le saurez pas. Na.

Et de là, ca en jette.

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Bon, ce qui est moins drôle, c’est qu’il est déjà 15h25, et que le château ferme à 16h, donc il va falloir visiter au pas de charge. Au passage, être étudiant c’est vraiment bien puisqu’en Syrie, au lieu de payer 3€ l’entrée dans un site, tu ne payes que 0,2€, la gratuité étant assurée aux citoyens syriens et aux ressortissants de nombreux pays arabes.

Bref, encore une fois, c’est magnifique.
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Le château est très bien conservé, et la vue est ébouriffante. Un exemple « au hasard ».

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Seulement, il y a une question que je vais laisser en suspens : il est 16h, comment allons-nous finir notre journée ? Réussirons-nous à parvenir à Hama ce soir ? Le plus dur, pour commencer, est encore de rentrer à Homs...



L'article suivant expliquera aussi la référence du titre. Je vous laisse faire des hypothèses.
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19 décembre 2009 6 19 /12 /décembre /2009 12:20
Aujourd’hui (vendredi 18 décembre), sachez-le, c’est l’Hégire. A noter qu'au moment où je finirai d'écrire, nous serons le 24, décalage horaire oblige.
L'Hégire, c'est le nouvel an dans le calendrier lunaire musulman. Aussi n’ai-je pas cours. Au Liban, on cumule les jours fériés des différentes communautés, c’est pratique : à la rentrée de janvier nous attend le Noël arménien par exemple. Mais à l’évocation du mot sacro-saint de Noël, je vous sens glaçé d’effroi. Horreur, tempête et chocolats, Noël approche à grands pas et ceux d’entre vous qui ont la chance de retourner au bled pour l’occasion ont déjà littéralement explosé leur budget mensuel pour acheter de menus cadeaux à leurs proches. La période de l’Avant est une course au long cours, un marathon dont on sort épuisé physiquement, déstabilisé moralement, vidé psychologiquement et à court financièrement.
A dire vrai, devant ce gouffre infini (au passage, un jour il faudra évoquer la dette de l’Etat libanais, qui est relativement à la taille du pays beaucoup plus importante que celle dénoncée par F. Bayrou lors de la dernière campagne présidentielle), beaucoup d’entre vous ont du mal à y croire. Propulsés soudain en plein paradis de la consommation contre votre volonté, vous croyez à une hallucination en voyant le père noël débarquer dans votre supermarché.
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A croire que mon appareil photo avait abusé des boissons vendues dans ce rayon. Incroyable mais vrai, Noël arrive. Et à Beyrouth (et surtout dans la partie Est, à majorité chrétienne), ce n’est pas une mince affaire.

Dans le paysage un peu désolé des Starbucks, Costa Café, travaux et Columbiano de la place Sassine, vous observez avec mélancolie les voitures passer, mises en mouvement par cette apparition quasi-onirique tant elle est difficile à comprendre qu’est l’agent de circulation (à noter que si vous passez sans son consentement, ce qui est extrèmement rare, cette illusion d’optique se fait fort de vous ramener à la réalité en assénant un coup de pied sur votre voiture, récupérant d’un seul coup tous les attributs de l’existence – ceci dit sans référence aucune à la phénoménologie hégelienne), eh bien d’un seul coup cette place grisâtre de pluie s’éveille à la douceur des chants de Noël. Des chants de Noël, aimablement débités dans des hauts-parleurs habilement situés, souvent en français dans le texte, ramènent votre raison tourmentée d’étudiant préocuppé avant tout par ses travaux à rendre à de plus sages considérations. Au cas où en arrivant à la faculté, vous seriez encore plein de soucis, rassurez-vous : il y a également un haut-parleur sous le préau. Et désormais, c’est une autre institution qui va capter votre attention : la crèche.

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Comme vous le constatez, celle de la place Sassine est grandeur nature.
Ici donc, Noël c’est important.
Mais dans mon petit quotidien, où que j'aille, je croise Noël. Il suffit que j'aille à la fac par exemple :
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A l'étage des sciences po :
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Mais la palme revient quand même au campus des sciences humaines :

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Et je vous passe les sapins et les crèches des bibliothèques et des salles de cours, car je sens votre agaçement monter : les crèches c'est mignon mais l'accumulation fait un peu "niais" . Pour ceux qui s'étonneraient encore de votre cette profusion de symboles chrétiens dans mon université, je rappelle que l'Université Saint-Joseph a été fondé en 1875 par des pères jésuites et qu'elle est encore et toujours dirigée par un religieux.

Les crèches fleurissent dans les halls d’immeubles. Les décorations sont installés dans les magasins, sur les balcons des maisons ... Les mauvaises langues ne manqueront pas de faire remarquer qu’il est un peu déplacé de faire fonctionner des guirlandes électriques alors que certaines régions sont privées d’électricité plusieurs heures par jour. Pour le peu que m’y connais et pour parler d’une façon très euphémisée, je ne peux pas leur donner complètement tort. Mais je crois que vous commencez à saisir que le Liban se caractérise par des inégalités assez fortes, et que ces ornements hivernaux ne sont qu’un des aspects pris par celles-ci. Pour enchaîner sur un autre thème lié à Noël, je peux évoquer le marché de Noël du centre-ville. Vous avez tous en tête le marché de Noël lillois (ou mieux, si vous comptez parmi les membres les plus importants de l’humanité, strasbourgeois), avec ses fausses cabanes en bois où les gogos trouvent des objets qui brillent et éventuellement quelques rasades de vin chaud. Ici, le marché se fait sous la grande tente d’exposition (rappelez-vous, elle a accueilli Questions pour un Champion pendant les Jeux de la Francophonie, ou encore le Hommos géant qui a battu le record du monde...) et est nettement plus sérieux : de la moquette verte et des petits stands pour les grandes marques, qui vous vendent essentiellement des habits féminins, des accessoires de mode, du petit mobilier... Encore une fois, pas de quoi faire rêver les enfants des gens modestes, qui ne viendront pas chercher une barbe à papa pour le petit dernier, ou une écharpe à offrir à grand’tata. Situé à proximité du centre-ville artificiel, ce marché de Noël me semble un lieu caricatural d’exercice de la ségrégation sociale. Excusez-moi pour les gros mots, mais à mon grand désaroi, je n’ai pas retrouvé la ferveur populaire du hommos géant et n’ai rien trouvé à acheter.
Je vous sais derrière un écran d’ordinateur et pourtant au bord de l’implosion. Quoi ? En ces temps difficiles, où nous devons à la fois subir l’élection de miss France, l’échec de la conférence de Copenhague, les frasques de Nadine Morano (pour ceux qui tiennent à le savoir, cette grande promotrice de la littérature française et de l’islam est une élue lorraine) pour ne pas parler du clip de l’UMP, il n’y a rien d’autre à évoquer dans Noël que le reflet d’une société consumériste et inégalitaire ? Si, rassurez-vous, j’ai une jolie histoire à raconter. L’histoire du marathon de Beyrouth. J’aimerais vous faire croire que j’ai couru les 42kms d’une foulée dont la vélocité n’aurait eu d’égale que l’élégance ; cependant, pour des soucis de fiabilité historique (je persiste à croire que les historiens de demain, vu le peu de cas que l’on fait de l’historiographie, devront s’abaisser à croiser des blogs simplement pour chercher à établir des faits), je me ravise. Je n’ai participé qu’à la course de 10km. Cette course rassemble des milliers de personnes. Par exemple, il y avait le premier ministre Saad Hariri. Si je ne l’ai pas encore dit et si vous ne suivez pas l’actualité politique libanaise, m. Hariri n’est plus seulement « Premier Ministre désigné », mais Premier Ministre pour de bon : un gouvernement de coalition a été formé, après plusieurs mois d’aternoiements et non d’éternuements, même si à force de claquer la porte des négociations, il semble normal qu’il y ait des courants d’air. Après cette petite disgression politico-comique qui a -je l’espère- plu à Janoé, je reviens au « 10km ». Cette « course » (je mets course entre guillemets car nombreux sont les participants qui se contentent de marcher, qui courent une partie du chemin et/ou qui ne cherchent pas à finir le parcours) est un moment particulier. Y participent des personnes de tous âges, des deux sexes, de toutes communautés. Les gens courent avec le tee-shirt de leur association (contre les mines anti-personnel, pour les droits des femmes...), leur entreprise (encore une fois, vous croisez de multiples banques sur le parcours), leur collège/lycée/université (ainsi votre aimable serviteur, qui arborait fièrement -fièrement?- le maillot de l’USJ) etc etc... Bref, c’est la cohue, surtout au départ qui n’est pas vraiment un départ mais plutôt le déplacement d’une foule, le long de la Corniche, qui crânement prend le temps d’un dimanche matin la place habituellement réservée aux voitures. Vous n’imaginez pas ce que représente Beyrouth (et surtout son bord de mer) sans voitures. C’est sans pollution, sans klaxon, presque calme (presque car des animations musicales, parfois pittoresques, égayent la marche de la meute qui dégage évidemment une clameur d’ensemble).
Le léger vent de la mer frappe votre visage et vous sentez vos muscles souffrir au contact du bitume. En un mot ou plusieurs, vous sentez que l’environnement urbain a aujourd’hui perdu ses principales forces dans la lutte qui l’oppose chaque jour à votre organisme. Chaque foulée (oui, j’ai couru quand même...) s’apparente à un ouf de soulagement, extirpant de vos poumons la suie noire de vos tracas quotidiens et de la fumée des taxis-service. Dieu que je trouve cette dernière image d’un à propos tout à fait discutable. Dans une émission de télé-réalité, elle m’aurait sans doute coûté la véhémence de la production. En attendant, la route continue : vous remontez la rue Hamra, rue mythique des folles nuits beyrouthines d’avant-guerre et qui tient encore à cultiver certains aspects extravagants, comme ses trotoirs étoilés.

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Les curieux seront ravis d’apprendre qu’au coeur de l’étoile, il est écrit « Association des commerçants de la rue Hamra ». Ensuite, vous repartez dans la direction opposée pour passer devant l’A.U.B., l’American University of Beirut, une institution non moins prestigieuse que l’U.S.J., beaucoup plus internationalisée et située donc dans le quartier qui bouge ; çà fait rêver. Pour rappelez au coureur qu’il passe devant une vénérable université fondée elle aussi par des missionnaires (mais protestants cette fois-ci), un concert de rock lui donnera les forces nécessaires pour faire les derniers kilomètres le séparant du centre-ville. A l’arrivée, je suis absolument comblé : je reçois un superbe tee-shirt « Marathon de Beyrouth », un cd vierge, un après-shampooing, une pomme, une bouteille d’eau, des prospectus publicitaires.

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Pour l’occasion : sur la photo il y a deux livres d’Amin Maalouf, que je vous conseille si vous voulez agrémenter vos vacances d’une approche romanesque de l’histoire du Liban : Le rocher de Tanios et Origines. Vous voyez que je déploie des trésors d’inventivité pour vous intéresser à mon pays d’accueil. Thomas (pas Tom-Tom, l’autre, désolé), si tu lis ces lignes, j’imagine que tu souscris à l’exclamation « festival pédagogique ! ». En tous cas, nanti par la gratitude des sponsors du marathon d’un tel équipement, comment pourrais-je maugréer au sujet de Noël ? N’est-ce pas un moment magique de réconfort dans l’adversité d’un rigoureux mois de décembre (« Anjad tu as couru ? Mais il faisait froid ! » : nous tournons autour de 15° ...) ? Bon, ce n’est pas le tout, mais je ne suis pas rentré dans ma Lorraine natale pour raconter ma vie mais pour apporter mon soutien à Nadine Morano qui paraît-il est dans une mauvaise passe. Je vous souhaite à tous un joyeux Noël. Profitez-en bien pour ceux qui rentrent. Les autres, j’espère que vous ne sentirez pas le sentiment déchirant de la solitude de l’étudiant post-moderne, perdu dans un monde sans valeur et qui s’est noyé en fuyant l’île qu’il avait lui-même transformé en désert.

A bientôt.
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28 novembre 2009 6 28 /11 /novembre /2009 13:14
Comme promis, je vous emmène dans quelques hauts lieux du Liban, que j’ai eu l’occasion de visiter ces derniers week-ends. Cette fois-ci, vous allez avoir la chance de voir plein de photos. A défaut de visiter par vous-même ce beau pays, vous aurez au moins l’occasion de le faire par procuration. Ceux qui comptent venir (s’ils existent) n’ont pas besoin de regarder cet article. Ils s’émerveilleront de leur découverte. En attendant, pour les autres, 3 destinations : Saïda, Tripoli et Bcharre.

Pour commencer, peut-être vous souvenez-vous de Saïda et des primesautières aventures culinaires qui avaient accompagné ma première visite.
Située à 43 kms au sud de Beyrouth, Saïda est la troisième ville du pays, avec plus de 160 000 habitants.


Saïda vue depuis « Le château de la mer » (oui il y a un « château de la terre » mais il n’est pas très joli)

Le château de la mer c’est çà :

Saïda est une ville à majorité sunnite, comme en attestent les nombreux portraits de Rafik Hariri et de son fils Saad.


Je me suis laissé dire qu’il s’agissait même du « fief » du défunt et de l’actuel premier ministre, et que tous deux avaient beaucoup oeuvré et investi de leurs deniers pour restaurer la ville, qui a souffert du conflit avec Israël.


Pour ce qui est de la vieille ville en tous cas, il est indéniable que des efforts ont été fait pour l’embellir. Vous avez des souks dans des petites ruelles où la pierre est ocre comme dans votre imagination d’occidental. En plus de la « maison Debbas », demeure ottomane que j’ai déjà évoqué, la ville peut s’enorgueillir de posséder un très beau musée du savon.


Un mur de savon : çà vous fait peur n’est-ce pas ? Sauf erreur majeure de ma part, ce musée du savon est un exemple de bâtiment parfaitement restauré grâce à des capitaux saoudiens.

Comme toutes les villes de la région, Saïda a été occupée au temps des Croisades. Ici, une église qui a été reconvertie en mosquée au XIII° siècle.



Cette évocation des croisades me permet de faire une superbe transition avec Tripoli et son château croisé.



Lorsque ceux-ci ont fait le siège de la ville (centrée sur le port), ils ont construit un énorme château autour duquel s’est construite une « nouvelle ville », qui aujourd’hui constitue une des deux « vieilles villes » de la ville de Tripoli, qui elle-même est à l’origine la réunion de 3 villes (Tripoli vient de « tri-polis », « trois villes ». Vous suivez ? Bon, pour le touriste de base, Tripoli se résumera à ses pâtisseries (je vous fais grâce d’une photo car je sens le désespoir de Léa Dony) et ses souks, qui sont effectivement très grands, avec un souk des bijoutiers qui étincellent de mille feux (je vous fais grâce ... vous savez quoi). Tenez, une petite photo charmante, même si elle ne colle pas trop avec l’image des souks.


Et maintenant, Tripoli au coucher du soleil. A noter la présence d’un individu neutre car Suisse sur la première photo.





Comme vous le remarquez, Tripoli, c’est grand ; en effet, Tripoli, c’est plus de 600 000 habitants. Désormais, je vous somme de rentrer en France : fermez les yeux, pensez très fort à la mairie de Lille pendant quelques secondes.



Vous percevez un rapprochement possible... et puis...


Mais assez d’humour de mauvais goût. Fuyons la ville corrompue pour trouver refuge dans la montagne. A l’instar des premiers maronites (les disciples de Saint-Maron) fuyant les persécutions au IX° siècle, nous remontons la vallée de la Qadicha pour arriver à Bcharre, la "maronite"


Petite photo de Samir Geagea et sa femme comme quoi la politique n’est jamais loin.

Vous connaissez le drapeau maintenant.

Qu’allions-nous faire en pleine montagne ? Nous promener benoîtement sur le Cornet el-Saouda, le « sommet noir », bien que tout autour du sommet la montagne soit enneigée. Certes, nous n’avons pas eu le courage de traverser la partie enneigée pour arriver à 3000m (c’est en fait le sommet du Liban), mais nous avons grimpé suffisamment haut pour vous offrir ces quelques photos-souvenirs :


Au fond, la vallée de la Qadisha, célèbre pour ses monastères taillés dans la roche (encore une fois, vous attendrez).


 Ici, vous voyez une des quelques réserves de cèdres du Liban. Bon, c’est vrai que çà paraît tout petit comme çà. Je le concède d’autant plus que j’ai appris qu’à la belle saison, on peut « visiter » cette réserve moyennant finances : il faut être motivé. A côté de la réserve, une petite station de sports d’hiver. Pour tous ceux qui réclament des preuves de mes allégations sur l’enneigement de la montagne et qui imaginent que le Liban est une terre aride où la neige est aussi improbable que le soleil à Lille.


Cette photo vous montre pourquoi nous ne sommes pas allés jusqu’au sommet : certains étaient venus en Converse. Sur le chemin du retour, nous avons eu l’occasion de contempler deux choses : des cultures en terrasses qui dessinent un relief impressionnant :
et une décharge sauvage, qui sert d’exutoire à la ville de Bcharre en bordure de l’ancienne route vers les Cèdres :

Maintenant que vous êtes abreuvés d’images mieux que si vous aviez regardé la télévision, vous vous dites sans doute : « mon pauvre Emile, tu n’auras plus rien à nous montrer à présent ». Je reste confiant. Ici, il suffit de sortir de chez soi pour découvrir quelque chose. Tout le monde n’a pas la chance de faire des années Erasmus, ne l’oublions pas mes amis ! En guise d’ouverture, une alternative très nuancée sur la porte de l’auberge de Bcharre (l’hôte était très accueillant) :


A bientôt !
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